TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D’ANGOULÊME
Première Chambre
N° R.G. : 00/00800
JUGEMENT DU 14 Décembre 2000
Affaire
Monsieur, Madame XXXXXX
Représentant : Me Bernard CHOQUET (Avocat au barreau de la Charente)
C/
INTERNATIONAL VACATION CLUB –IVC
SHORE CANARIAS S.L.
THE RICHMOND TRUST COMPANY LTD
EXÉCUTOIRES
DELIVRES LE
15.12.00
Composition du Tribunal :
Magistrats ayant délibéré :
Président : Catherine JEANPIERRE-CLEVA, Vice-Présidente
Assesseur : Anne VERRIER, Juge
Assesseur :Sabine PEYROU, Juge
Greffier : Gilles MAZOIN-CHARAMNAC, Greffier Divisionnaire
DÉBATS :
Vu l’ordonnance de clôture en date du 30 octobre 2000 ayant fixé l’audience de plaidoiries au 09 novembre 2000 où l’affaire a été plaidée et mise en délibéré au 14 décembre 2000.
JUGEMENT : Prononcé en audience publique par Madame JEANPIERRE-CLEVA assistée de Madame MOISAN, auditrice de justice.
LES FAITS : (synthèse)
Séjour d’une semaine à LANZAROTE gagné dans le cadre d’un tirage au sort.
Offre confirmée par courrier.
Lors du séjour, signature le 15.07.99 d’un contrat intitulé « demande d’adhésion » proposant des vacances gratuites à vie.
Au terme de ce document, il était demandé de payer 11.111 F immédiatement et 50.574 F le 15 août 1999, le total correspondant à la cotisation d’entrée donnant droit à 25.000 points.
Signature d’un document au terme duquel les époux XXXXXX s’engageaient à payer 50.574 F à la société au plus tard le 15 août 1999.
Le 15 juillet 1999, ils remettaient leurs 2 cartes bleues au dénommé Alain GRAF afin de lui payer la somme de 11.111 F stipulée. En fait, un total de 11.827,16 F était prélevé sur leurs comptes.
Le 16 juillet 99, demande vaine d’annulation du contrat et restitution de l’acompte.
Par lettre du 17 août 99, la société demandait le versement du solde soit 44.000 F payable en mensualités de 1.000 F.
Le 17 novembre 99, la même société demandait de s’expliquer sur les raisons du non-paiement du solde restant dû.
Par lettre du 26 janvier 2000, la société réclamait le paiement de la somme de 50.574 F.
PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par acte d’huissier du 3 mars 2000, M. et Mme XXXXXX ont assignés les sociétés afin d’obtenir, aux terme d’un jugement assorti de l’exécution provisoire, le prononcé de la nullité de la convention du 15.07.99, leur condamnation solidaire à leur rembourser la somme de 11.827.16 F avec intérêts au taux légal à compter de la date de l’assignation et la capitalisation de ces intérêts. Ils sollicitent également, la condamnation solidaire à leur payer 5.000 F de dommages-intérêts et 12.000 F sur le fondement de l’article 700 du N.C.P.C.
Faisant valoir le privilège de juridiction édicté par l’article 14 du code civil et l’application des dispositions d’ordre public international, ils indiquent, au soutien de leur demande, que le contrat signé est nul …
La clôture de l’instruction a été prononcée le 30 octobre 2000 et l’affaire a été plaidée le 9 novembre 2000.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la nullité du contrat :
Attendu que l’article 1311 du code civil dispose que « l’obligation sans cause, sur une fausse cause ou sur une cause illicite ne peut avoir aucun effet ».
Attendu, en l’espèce, que le document intitulé « demande d’adhésion » signé le 15.07.99 stipule qu’IVC met à la disposition de ses membres « des vacances et offres de points ».
Attendu qu’aucune autre précision relative à ces prestations n’est mentionnée.
Attendu que le document appelé « règlement d’occupation », à supposer qu’il soit un document contractuel, ne donne pas davantage de renseignements sur la nature et les caractéristiques des « vacances » offertes si ce n’est qu’elles peuvent se dérouler « des semaines entières, en milieu de semaine ou le week-end ».
Attendu que les époux XXXXXX sont également dans l’ignorance des personnes à contacter et des démarches à effectuer pour réserver les prétendues vacances, les seules coordonnées de la société IVC correspondant à une adresse au Bahamas.
Attendu qu’il résulte de ces éléments que l’obligation de la société IVC n’est ni déterminée ni déterminable.
Attendu que le contrat signé est donc manifestement dépourvu de cause.
Attendu d’autre part, qu’en vertu de l’article 1116 du code civil, « le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l’une des parties sont telles qu’il est évident que, sans ces manœuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté . Il ne se présume pas et doit être prouvé ».
Attendu qu’en l’espèce, la demande d’adhésion litigieuse a été signée au cours d’un séjour à LANZAROTE organisé et offert par la société.
Attendu que les termes ambigus des lettres adressées par la société, à savoir « l’obligation d’assister en couple à la présentation prévue par le formulaire » permet de penser que ce séjour était destiné à obtenir la signature des demandeurs sur le document litigieux.
Attendu que sur place, ils n’ont pas manqué d’être relancés régulièrement par des intervenants leur proposant des vacances dans les plus beau pays du monde.
Attendu que c’est ainsi que les époux XXXXXX ont finalement signé la demande d’adhésion aujourd’hui contestée.
Attendu que ces mises en scène et façons de procéder sont indéniablement constitutives de manœuvres dolosives sans lesquelles les demandeurs n’auraient pas contracté.
Attendu que le dol est donc constitué.
Attendu, dans ces conditions, qu’il convient de prononcer la nullité du contrat intitulé « demande d’adhésion » et donc de remettre les parties en l’état antérieur à sa signature.
Sur la solidarité entre les sociétés IVC, SHORE CANARIAS SL et THE RICHMOND TRUST COMPANY LTD :
…/…
Attendu qu’il ressort de ces éléments une confusion certaine entre les trois sociétés défenderesses qui sont toutes intervenues dans le cadre du contrat signé.
Attendu dans ces conditions qu’il convient de condamner solidairement les sociétés … à restituer aux époux XXXXXX la somme de 11.827,16 F versée par eux avec intérêts au taux légal à compter du 3 mars 2000, date de l’assignation constitutive d’une sommation de payer au sens de l’article 1153 du code civil.
Attendu qu’en vertu de l’article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à la demande de capitalisation pour les intérêts dus pour une année entière.
Sur la demande de dommages-intérêts à hauteur de 5.000 F :
Attendu que les époux XXXXXX ne justifie pas avoir subi un préjudice moral.
Attendu qu’ils seront déboutés de leur demande de dommages-intérêts à ce titre.
Sur l’exécution provisoire :
Attendu qu’aucune circonstance de la cause ne justifie l’exécution provisoire du jugement à intervenir.
Sur l’article 700 du N.C.P.C. :
Attendu que les sociétés … succombant à l’instance, il y a lieu de les condamner aux entiers dépens.
Attendu que l’équité commande de faire droit à la demande formulée par les époux XXXXXX au titre de l’article 700 du N.C.P.C. à concurrence de 5.000 F .
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort ;
PRONONCE la nullité du contrat intitulé « demande d’adhésion » conclu le 15 juillet 1999 ;
CONDAMNE solidairement les sociétés … à restituer aux époux XXXXXX la somme de 11.827,16 F - soit 1.803,04 € - avec intérêts au taux légal à compter du 3 mars 2000 et capitalisation des intérêts dus à compter de cette date ;
DÉBOUTE les époux XXXXXX de leur demande de dommages-intérêts ;
DIT n’y avoir lieu à exécution provisoire ;
CONDAMNE solidairement les sociétés … à payer aux époux XXXXXX la somme de 5.000 F - soit 762,25 € - au titre de l’article 700 du N.C.P.C. ;
CONDAMNE solidairement les sociétés … aux entiers dépens dont recouvrement au profit de Maître CHOQUET, avocat, conformément à l’article 699 du N.C.P.C. ;
Le présent jugement a été signé par Catherine JEANPIERRE-CLEVA, Vice-Présidente, et par Gilles MARZOIN-CHARAMNAC, Greffier Divisionnaire.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE